La Chapelle Ste
Aldegonde1914 - 1939
Texte inspiré d’une lettre de Monsieur Georges DUBUT
Chansonnier, Chroniqueur
Maubeugeois, Officier de l’Instruction Publique.
La Chapelle
de Ste. Aldegonde
se trouve au petit faubourg du « même nom» plus connu sous le nom de Glacis.
La
chapelle a été démolie
par
l'explosion de la poudrière de l'Arsenal de Falise. Cette explosion a eu lieu le 6 Septembre 1914 vers
18 heures et je vous en parlerai plus loin.
Cette chapelle est
due à. la piété des
gens de la région de Maubeuge pour leur
sainte Patronne Aldegonde. Celle-ci était
la seconde fille d'un puissant seigneur Walbert IV qui habitait COUSOLRE. Vous
n'ignorez pas qu'elle quitta le château paternel ne
voulant pas épouser le prince Eudon
dont le père était le Chef de l’Heptarchie
saxonne en Angleterre, elle s'achemina vers Malbodium (ainsi s’appelaient les mauvais bois qui
couvraient les bords de la
Sambre). C'est au cours de cette fuite, qu'exténuée de fatigue, elle s’arrêta au lieu-dit, aujourd'hui, le Glacis. Ayant soif, jaillit une source qui existe
encore aujourd'hui. C’est à l'endroit où se trouve
cette source, qu'au cours des siècles la Chapelle a été construite et devint
un lieu de pèlerinage.
On sait qu'après le passage de la Sambre
(soulevée
par des anges dit une légende)
Aldegonde ayant appris que le Prince Eudon était retourné en Angleterre et renonçait à ses projets
matrimoniaux, retourna chez ses parents à Cousolre. Elle revint ensuite à l’Abbaye d'Hautmont se vouer à
Dieu, entre les mains des Saints Évêques
Aubert et Amand. Enfin elle revint à cet endroit appelé Malbodium, vers l’année 657 (dit Piérard et 635 dit
Jennepin.) C'est alors qu'elle fonda en 661 (dit Piérard - et 657 dit Jennepin) deux couvents l'un de religieuses, dites plus tard de Ste Aldegonde et un
couvent d'hommes dont les premiers occupants
furent 12 Religieux de l’église
de St Quentin qui se trouvaient (nous dit le testament de Ste Aldegonde ) dans « le village de Maubeuge ».
C'est donc autour de ces couvents que vinrent se grouper les premières maisons qui
devinrent les premières assises de la Cité
Maubeugeoise.
Voici comment je consigne cela dans mon livre « Journal d'un bourgeois
de Maubeuge », avant et pendant
le siège
et l'occupation allemande I914-I9I8 »
L’explosion de la poudrière de Falize.
Un peu plus tard, tandis que nous terminions un triste souper, une
détonation formidable renverse et brise tout ce qui se trouve sur notre
table ; une fenêtre éclate derrière nous. Mon gros encrier vole en l'air
projetant partout de larges taches d'encre. Nous nous retrouvons dans les bras
les uns des autres en comprenant que c'est la poudrière de Falize qui vient de
faire explosion.
Par ordre du Général FOURNIER, Gouverneur, toutes les maisons
des alentours de l'Arsenal avaient été évacuées. Nous avions donc abandonné
notre demeure du 43 de l'Avenue de Ferrière et le souper dont je parle avait
lieu, plus haut sur la route de Ferrière, dans la maison occupée par des amis.
Le 9 Septembre commence l'occupation allemande et le
cadran de 1’Eglise St Pierre marque déjà l'heure de l'Europe centrale. Les
couleurs allemandes flottent sur la Mairie.
Le 12 Septembre, je suis allé au Glacis pour constater
les dégâts causés par l’explosion. La dévastation du faubourg Ste Aldegonde,
commencée par l’artillerie allemande, a été consommée par l’explosion de la
poudrière de l’Arsenal de Falize. Le glacis avec ses haies vertes, ses
maisonnettes, ses jardins de poupées arrosés par la Sambre, ses pâtures bordées
de saules. C’était un coin charmant pendant les beaux jours d'été.
Quel spectacle ! Un cyclone avait passé,
renversant les habitations, arrachant les arbres. Quelques murs ébréchés
émergent des ruines, des meubles cassés, des débris de verrier, un comptoir indique
l'emplacement d'un cabaret où les joueurs de quilles se donnaient rendez-vous
le dimanche. La Chapelle de Ste Aldegonde « bien connue dans le pays (comme
je le chantais naguère clans mon recueil "Maubeuge en chansons") a
disparu. La tête d'un saint sort des décombres. La source où les fidèles
trempaient leurs branchettes le jour de la procession, en indiquent
l'emplacement.
J'ai ouï dire que seule la tête de l'antique statuette de la Patronne de Maubeuge (ornement de la Chapelle depuis un temps immémorial) avait été retrouvée dans les décombres. En tous cas elle est toujours visible dans la petite chapelle en bois qui existe encore au glacis, à l'emplacement de l'ancienne et qui fut reconstruite provisoirement par un dévoué habitant du faubourg, Monsieur AFFLARD, employé à la construction des lignes télégraphiques et téléphoniques à Maubeuge.
La chapelle provisoire « Sainte
Aldegonde »après la guerre de 1914.
On peut voir dans cette petite chapelle des troncs pour
recevoir les modestes offrandes des visiteurs, ainsi que de nombreux petits
cadres avec des images du Sacré-Cœur, de la Vierge Marie et de Sainte Thérèse
de l’Enfant Jésus. Ce sont là de simples ex-voto offert par des personnes dont
les enfants ont été guéris par l’intervention de la Sainte.
À droite de la. Chapelle se trouve la source et son petit
filet d’eau que fit jaillir Aldegonde lorsqu'elle était poursuivie par le
Prince Eudon.
Une personne du glacis possède la clé de la Chapelle et
celle-ci est ouverte tous les vendredis à la dévotion des fidèles. Ce jour-là
on peut voir des mères de famille y venir avec leurs enfants en pèlerinage et
faire exécuter à ces derniers, pour les apprendre à marcher trois fois le tour
de la Chapelle après avoir fait brûler un cierge.
La procession populaire de la Sainte a lieu chaque année le
dimanche qui se trouve entre l'Ascension et la Pentecôte, Elle part à 6 heures
du matin de l'église de Maubeuge et passe par la rue de Mons, la Porte de Mons,
le chemin de ceinture, le Pont-Rouge, l’Abattoir, l’Avenue de la Gare, puis la
Chapelle du Glacis. Des prières sont dites à la Chapelle dont nous nous
occupons, puis la procession regagne l’église Saint Pierre – Saint Paul en
traversant la Ville au son des cloches de la Paroisse.
Tel était l'itinéraire
avant la guerre de 1939. La statue de la Chapelle est portée, à cette
procession, par des jeunes filles du Faubourg Sainte Aldegonde. Après la
station du glacis, la statue rentre en. ville, reste exposée à l'église puis
retourne reprendre la place dans sa chapelle, après les vêpres (c'est ainsi
que les choses se passaient déjà il y a quelques années).
Le costume des Chanoinesses.
Avant la disparition du chapitre de Sainte Aldegonde à la
Révolution, les Chanoinesses assistaient à la procession revêtues du costume
que leur avait imposé BRUNON, archevêque de Cologne, quand en 963 il avait
transformé les couvents fondés par Ste Aldegonde en chapitres réguliers. Cet
uniforme consistait en un habit blanc, un surplis de toile fine et un manteau
noir fourré d'hermine.
Ce costume fut porté par les Dames Chanoinesses jusqu'à la
révolution. Chaque année le jour de la procession, les chanoinesses faisaient
édifier une tente de toile à la station du Glacis. Après les prières, sous
cette tente, elles offraient aux autorités et aux officiers de la garnison qui
avaient assisté à la procession avec leurs troupes, musique en tête, une copieuse
collation composée de tartes diverses et de gaufres, arrosées de vins fins,
Voici le cantique qui se chantait à la procession, à- la fête
de Sainte Aldegonde qui se célèbre le dernier dimanche du mois de Janvier.
HYMNE-CANTIQUE à Sainte Aldegonde
(Paroles de
Georges DUBUT - musique de Louis RIQUIER organiste de l’église Saint
Pierre-Saint Paul)
I - Aux jours
bénis de ton enfance
Avec ferveur tu prias Dieu
Tu mis en
lui toute espérance
Et voulus
dire au monde- adieu
D'un prince
puissant de la terre
Refusant l’anneau
nuptial
Tu fondas
ton saint monastère
Pour suivre
ton noble idéal
(Au
refrain)
II - Maubeuge, à l’ombre
de ton cloître
Naquit en
un siècle de foi
Et son
essor ne fit que croître
Ainsi que
son amour pour toi
Aux jours
de deuil et "de misère
Tu nous
aidas à supporter
Les fléaux
qu’engendre la guerre
Venant
encore nous attrister
III - Aussi tous nos
pieux cantiques
Célèbrent
ton nom vénéré
Et nous
honorons tes reliques
D’un culte
fervent et sacré
Car Maubeuge
en sa fière enceinte
Garde le
voile précieux
Que jadis
la colombe sainte
Vint apporter
du haut des cieux
IV - Maintenant qu'au séjour céleste
Tu rayonnes
dans ta splendeur
Reste,
sainte Patronne, reste
La
messagère du Seigneur
Implore
pour nous sa clémence
Demande-lui
cette faveur
De conserver
à notre France
Une place
en son divin cœur
Refrain
0 Vierge secourable, 0 sublime Aldegonde
Patronne de Maubeuge, assiste tes enfants
Et que sous ton égide ils sortent triomphants
Des épreuves du monde.
Note sur le
troisième couplet du cantique à Sainte Aldegonde.
Le Père TRIQUET, Jésuite, raconte dans son texte sur la vie
de Sainte Aldegonde qu’à l’Abbaye d’Hautmont lors de la consécration à Dieu de
la future sainte par les Évêques AUBERT et AMAND, une colombe vint du ciel,
déposer un voile sur la tête d’Aldegonde
.
![]() |
Reliquaire du voile de Ste. Aldegonde (Trésor de l'église de Maubeuge, photo JYB) |
C’est ce
voile qui serait conservé dans le magnifique reliquaire du XVème siècle qui se
trouve dans le Trésor de l’église de Maubeuge.
![]() |
Intérieur de la chapelle Sainte Aldegonde (Photo Ville de MAUBEUGE) |
![]() |
Source Sainte Aldegonde |
Ce récit, écrit au début du siècle dernier, nous fait revivre ces moments de ferveur quai connue cette chapelle et ce quartier dédié à Sainte Aldegonde. Une nouvelle chapelle fut construite au début des années 50. (Photos de la chapelle et de la source en 2016.)
Remerciements.
Remerciement à Monsieur David
DELEYE (Ville de MAUBEUGE) pour la photo de l’intérieur de la chapelle Sainte
Aldegonde.
Remerciement à Monsieur François De VRIENDT (Société des
Bollandistes de BRUXELLES) pour ses précieux renseignements sur ce Blog.
Informations
complémentaires.
Monsieur François De VRIENT complète cet exposé en
écrivant : « La Fontaine de
Sainte Aldegonde était probablement à l’origine, le but de la grande procession
en l’honneur de Sainte Aldegonde se déroulant le mardi de Pentecôte du moins
après 1439. »
« On amenait à cet endroit les reliques de la patronne de Maubeuge, on y
célébrait un office, puis on repartait vers la ville. Bref, dans l’histoire
religieuse de la ville c’était un lieu important. S’il est probable qu’une chapelle existait au 18e s., je
n’en ai pas trouvé de trace auparavant (ainsi le Père Triquet dans son
inventaire du milieu du 17e s. recense 5 chapelles à Maubeuge
dédiées à Aldegonde, mais aucune ne semble correspondre à celle du
Faubourg-St-Aldegonde). En revanche la « fontaine », à savoir la
source, est attestée par Triquet, qui précise que l’on venait y chercher l’eau
à des fins curatives. »
Merci pour ces informations très utiles sur la chapelle, qui fut, pendant des siècle, un haut lieu de l'histoire de Maubeuge. Cet endroit était en fait aussi, selon moi, le terminus de la grande procession Sainte-Aldegonde qui, chaque année, réunissait quasi toute la ville. Est-il possible de visiter l'intérieur de la chapelle ? Merci encore. François De Vriendt - Société des Bollandistes - Bruxelles devriendt@bollandistes.be
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